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Le papier-cadeau

Ça fait longtemps qu’on n’a plus droit à du papier-cadeau, nous ! plaisante mon fils.

Le papier cadeau : le recyclé est-il un phénomène de mode?

Dans quelques jours, ce sera Noël, et en ces temps où l’écologie est en vogue sur les plateaux télévisuels, le JT nous propose un reportage sur les papiers-cadeaux alternatifs. Recyclables, décomposables, germables, 100% recyclés…, des solutions pour éviter le gaspillage.

« En France pas moins de 20000 tonnes de papiers-cadeaux seraient consommées chaque année » dont la quasi-totalité serait incinérée, la plupart ne se recyclant pas. Les plastifiés, les pailletés, les irisés… – les plus attrayants en sorte – doivent partir avec les ordures ménagères entre boîte à camembert et épluchures de banane. Un crève-cœur.

On ne peut même pas allumer son feu de cheminée avec, la fumée qu’ils dégagent étant plus ou moins toxique. Une plaie.

J’ignorais tous ces détails quand j’ai commencé mes fantaisies, il ne s’agissait que d’une intuition. Mais en effet, je n’achète plus de papier-cadeau depuis des lustres. Depuis le jour où je me suis dit que franchement toute cette débauche d’emballages aux anniversaires et à Noël, c’était un peu idiot. Du gâchis. Ni économique ni écologique.

Les enfants les adorent, j’en conviens. Les couleurs, les paillettes, le bruissement du papier… c’est souvent plus important pour eux que le cadeau lui-même. Je me souviens avec émotion de ma fille passant toute la soirée de son premier Noël à se rouler dans le papier et à jouer avec les bolducs. Ce qu’elle était mignonne ! Bien sûr, on n’a pas envie de se priver de ces plaisirs tout simple.

Le papier-cadeau recyclé?

Alors du papier-cadeau, oui, mais de seconde main ou upcyclé. Deux tendances très à la mode désormais, deux termes aussi (cf article précédent). On aurait dit récupéré il y encore quelques années !

Je recycle le papier-cadeau usagé comme bon nombre de familles. C’est surtout chez les vieux qu’on procède ainsi, eh bien moi, j’adhère.  À la fin des festivités, je trie patiemment les papiers rescapés en mettant d’un côté ceux qui peuvent encore faire l’affaire en les retaillant et, de l’autre côté, les bribes inutilisables. Je roule soigneusement les premiers pour les remiser jusqu’à la prochaine occasion. Devant les seconds, c’est chaque fois un déchirement. Comme si je me trouvais devant une œuvre d’art brisée, rechignant à me débarrasser des morceaux qui me font de l’œil. Il doit y avoir quelque chose de génétique, ma mère en pleurerait. Un beau motif, une chouette alliance de couleurs, un chatoiement. Si j’en avais les compétences, je recréerais bien du patchwork de papier avec tous les jolis rogatons ou encore des œuvres murales. Il doit bien y avoir des artistes dans ce créneau-là, il faudrait que j’investigue.

Quand je n’ai plus assez de papier-cadeau de récup, et c’est souvent pour les grosses pièces à emballer qu’il me fait défaut, j’utilise d’autres papiers du quotidien tout simplement. Tout y passe ! Posters, pages de livres d’art, journaux asiatiques (les gratuits de Belleville, ils sont superbes !), sacs en kraft, notices de montage (j’adore celles d’Ikea), cartes routières (en voie d’extinction comme les poissons-lune), pages de BD, film-bulle… Tant que le support est graphique ou qu’il peut être décoré (au feutre, avec des collages…), c’est bon à prendre ! Je collecte toute l’année ces merveilles. Rien que la perspective de leur offrir une seconde chance me réjouit.

En ajoutant des rubans (de récupération évidemment) et en variant les motifs, le résultat se révèle aussi joli qu’avec du papier-cadeau traditionnel. Et jamais personne ne s’est offusqué, parmi mes proches du moins, d’extirper un pull d’un pan de carte-routière ou une montre d’une photo de Paris by-night. Mieux, ça les amuse. La surprise avant la surprise. Qu’est-ce qu’elle est allée nous dégoter comme papier ?

Ma mère a expérimenté les pochettes en papier-peint, quand elle avait des chutes dans les années 80, c’était pas mal aussi. Quand je parle d’atavisme…

Avec les posters et cartes IGN, comme avec le papier-peint, la difficulté, c’est le collage. Le ruban adhésif ne tient pas. Il vaut mieux agrafer (attention aux petits doigts qui risquent de se blesser) ou lier avec rubans, raphias, cordes… Il faut y mettre un peu du sien, mais ça vaut le coup.

L’année prochaine, enfin peut-être (ça fait déjà deux ans que j’y pense sans agir), je coudrai des sacs dans des chutes de tissus pour emballer les cadeaux. On pourra ainsi les réutiliser à l’infini ou les recycler en sacs à chaussures, à linge, à légumes ou je ne sais quoi d’autre. Mais ça, c’est pour… plus tard. Je pourrais aussi me mettre au furoshiki, cet art japonais qui consiste à emballer les cadeaux dans des carrés de tissu savamment pliés et noués. Mais ça, c’est pour… encore plus tard, ça n’a franchement pas l’air simple, cette affaire. D’ici là il n’y aura peut-être plus que des cadeaux dématérialisés, allez savoir.

Et vous, vous tenez au papier-cadeau traditionnel ou avez opté pour des solutions alternatives ?  Je suis curieuse de connaître vos bonnes idées, indiquez-les en commentaire.

Dites-le !

J’ai l’impression d’avoir fait mon coming out la semaine dernière, c’est drôle ! Merci à tous pour vos messages de soutien et d’amitié qui m’ont beaucoup touchée.

Mon témoignage n’a d’intérêt que s’il est partagé. Si vous tapez « cancer du pancréas » sur Google, vous verrez, vous n’obtiendrez que des infos alarmistes. Et quand je dis alarmiste, c’est vraiment alarmiste. Il faut témoigner au contraire que la médecine fait des progrès tous les jours, que des cancers se guérissent, même celui du pancréas. Racontez mon histoire à vos proches concernés de près ou de loin par cette saloperie, donnez-leur de l’espoir et la force de se révolter contre la maladie. Dites à ceux qui vont être opérés ou entrer en traitement qu’ils seront sacrément secoués, qu’il y aura très certainement pour eux un « avant » et un « après », et que l’après leur réserve bien des surprises, même des bonnes.

Dans mes romans coule la sève de l’espoir. Le meilleur est souvent possible, j’ai écrit dans Merci Gary. J’y crois plus que jamais.

Il y a un an…

Il y a un an, on me diagnostiquait un cancer de la tête du pancréas. Sidération. Cela n’arrive pas qu’aux autres, je le savais, et pourtant le choc n’en fut pas amoindri.

Chirurgie, chimio, un abdomen balafré, un crâne à nu, quelques organes en moins, pas mal de kilos envolés, des effets secondaires incommodants…, j’ai connu des bas et des « plus hauts », conservé malgré tout un optimisme chevillé au corps et à l’âme, capitonné d’une bonne couche d’inconséquence très certainement et de résilience innée. J’ai été merveilleusement accompagnée par le corps médical, mes proches, mes amis, et le suis encore. J’ai rencontré des patients fantastiques, qui ne lâchent rien malgré des années de douleur et de traitement. J’ai désormais acquis une conscience accrue de ce qui importe, de ceux qui comptent, et du reste et des autres sur lesquels il n’y a pas lieu de s’attarder.

Si l’on se fie aux statistiques, on ne survit pas à une telle maladie. Les ignorer, croire en ses chances, faire confiance aux médecins, et se convaincre qu’on peut s’en sortir. Mais le mental, s’il est essentiel, ne suffit pas pour vaincre le crabe, j’ai eu de la chance. Rencontre avec des professionnels de santé épatants, diagnostic précoce, bon état général, super équipe médicale à proximité, entourage réconfortant.

Rémission totale. Tout le monde n’a pas cette veine. Quand je l’oublie un instant, les autres me le rappellent, un peu trop brutalement parfois, j’ai de la chance de m’en être sortie jusque-là. Le petit renflement sous ma clavicule droite, dû à la chambre d’injection implantée et encore en place pour le cas où…, me rappelle, lui aussi, devant le miroir qu’une épée de Damoclès flotte toujours au-dessus de ma tête. Je préfère ne pas lever les yeux vers elle et garder le regard fixé sur l’horizon en profitant de tout ce que la vie m’offre.

« Une vie normale » m’avait laissé espérer le chirurgien. Ce qui ne signifie pas « une vie comme avant », je l’ai compris à retardement. Cette foutue naïveté, encore. Il me faut composer avec quelques ajustements mineurs. J’ai heureusement conservé mon cadre personnel, logement, amis, famille, hobbies…, et je fais un peu plus attention à moi. Je n’ai pas encore repris le travail, un poste trop stressant assurent les médecins, mais comme je n’en ai pas d’autre à portée dans l’immédiat, je prends mon temps. Un luxe. Ma vie est devenue plus précieuse, c’est finalement la grande différence. Tout le monde croit connaitre sa fragilité, répète à l’envi qu’on en a qu’une, mais c’est un privilège, je crois, d’en avoir la certitude ancrée dans sa chair. Pour mieux s’en délecter. Il n’est pas donné à tout le monde de savourer la vie, il faut y être entraîné ou forcé par le destin.

Le plus cocasse c’est qu’au départ de la chaîne de ma chance, de tout ce qui a concouru à me sauver, se trouve la Covid car c’est à cause de ses suites que je suis allée consulter. Comme quoi dans tout il y a du bon, encore un truc qu’on répète sans s’en convaincre.

Le cancer est un évènement intime, m’ont dit certains, je comprends que tu n’en parles pas. Si je ne l’ai guère évoqué jusque-là, c’est pour ne pas inquiéter, pour que l’on ne s’apitoie pas sur mon sort, et non parce que c’est « intime ». Ce que j’ai ressenti, ce que je ressens est intime mais pas le fait d’être touchée comme tant d’autres. Au contraire, il faut en parler, et c’est pourquoi je publie ce message pour contribuer à mon humble niveau à ce que la maladie ne soit plus un tabou, en entreprise et partout ailleurs, pour que tous ceux qui sont ou seront concernés soient convaincus qu’ils n’ont pas à culpabiliser, à se taire, que le cancer n’est pas contagieux, même pas par les mots, qu’il effraie moins quand on en parle et surtout, surtout !, qu’ils peuvent espérer eux aussi « avoir de la chance » et s’en sortir. Un an après, moi je vais bien !

Thomas Pesquet, le retour.

Photo Cité de l’espace

Thomas Pesquet est de retour parmi nous, les Terriens. Je l’ai déjà écrit, cet homme me stupéfie, dans le bon sens du terme. M’épate quoi. Il semble aller dans l’espace comme d’autres vont ramasser des champignons, en toute décontraction, avec le sourire aux lèvres et l’envie inoxydable d’expliquer que c’est pas la mer à boire tout ça. Des tuyaux, de l’oxygène, quelques effets incommodants dont personne ne voudrait, trois fois rien. Des comme lui, il n’y en a même pas autant que de doigts de la main.

Quand je suis tombée par hasard sur un post de Bruno Le Maire sur un réseau social, je ne sais plus lequel, qui le qualifiait de héros et se prenait dans la tête une avalanche de réponses s’insurgeant contre ce qualificatif, j’ai été stupéfaite, dans le mauvais sens cette fois. Les pompiers et les soignants sont des héros, pas lui. Il est grassement payé pour ce qu’il fait. Risques nuls à notre époque, avec tour le staff derrière. Gagarine était un héros, pas lui dans sa spacieuse station… J’en passe et des moins aimables. Et j’imagine hélas n’avoir lu qu’un pouillème du dégueuli réseaux sociaux et moins sociaux sur le sujet.

Alors j’ai cherché, me trompais-je ? Héros, celui qui se distingue par ses exploits ou un courage extraordinaire.

Un exploit de rester six mois en orbite à 400 kms au-dessus de nos têtes ? Certainement. Du courage d’affronter les épreuves physiques, mentales, psychiques pendant les années de sélection et durant tout le séjour ? Sans aucun doute.

On n’attaque pas mon idole ! Le sujet est clos, il n’y a pas lieu d’en débattre. Point à la ligne. (Un bon titre de roman, non ?)

On ne peut pas vivre l’instant…

« Je parie que tu es écrivain. Ou apprenti écrivain. Ne t’étonne pas : j’ai appris à reconnaître les gens de ton espèce au premier coup d’œil. Ils regardent les choses comme s’il y avait derrière chacune d’elle un profond secret. Ils voient un sexe de femme et le contemplent comme s’il renfermait le clef de leur mystère. Ils esthétisent. Mais une chatte n’est qu’une chatte. Il n’y a pas à baver votre lyrisme ou votre mystique en y noyant vos yeux. On ne peut pas vivre l’instant et l’écrire en même temps.

— Bien sûr que si. On peut. C’est ça, vivre en écrivain. Faire de tout moment de la vie un moment d’écriture. Tout voir avec les yeux d’un écrivain et…

Voilà ton erreur. Voilà l’erreur de tous les types comme toi. Vous croyez que la littérature corrige la vie. Ou la complète. Ou la remplace. C’est faux. Les écrivains, et j’en ai connu beaucoup, ont toujours été parmi les plus médiocres amants qu’il m’ait été donné de rencontrer. Tu sais pourquoi ? Quand ils font l’amour, ils pensent déjà à la scène que cette expérience deviendra. Chacune de leurs caresses est gâchée par ce que leur imagination en fait ou en fera, chacun de leurs coups de reins, affaibli par une phrase. Lorsque je leur parle pendant l’amour, j’entends presque leurs « murmura-t-elle ». Ils vivent dans des chapitres. Un tiret de dialogue précède leurs paroles (…), en fin de compte, les écrivains comme toi sont pris dans leurs fictions. Vous êtes des narrateurs permanents. C’est la vie qui compte. L’œuvre ne vient qu’après. Les deux ne se confondent pas. Jamais. »

Ce texte est extrait du dernier roman de Mohamed Mbougar Sarr (lecture recommandée par mon amie Nicole), La plus secrète mémoire des hommes, qui vient d’obtenir le Prix Goncourt et dont j’aurai très certainement envie de reparler.

C’est la magie des textes réussis de mettre des mots sur des situations, des émotions qu’on a connues, de les faire remonter dans sa mémoire, de leur donner de la matière. En lisant cet extrait, je me suis revue à l’hôpital (loin d’une scène d’amour !) il y a quelques mois en train d’imaginer la façon de décrire ce que je vivais, d’en construire des phrases. Je percevais qu’il s’agissait pour moi d’écrire ces instants douloureux pour ne pas les vivre vraiment. De me placer en observateur pour ne pas en être le sujet. Ah ça, j’en ai mis dans mon récit mental des tirets, des « pensa-t-elle », des « dit-il », des silences et des bruits de crocs dans le couloir !

Page auteur sur Facebook

Photo de Anna Shvets provenant de Pexels

Depuis quelques mois, je suis dans un mood ménage, j’en ai déjà parlé. Je trie, je répare, je recycle (surtout pas de gâchis).

A chaque chose, sa case ; à chaque case, ses choses. Mon profil Facebook n’y échappe pas. Jusque-là il était ouvert à (presque) tous, aux copines comme aux curieux, aux amis d’enfance comme à des confrères auteurs. Evidemment je veillais scrupuleusement à ce que j’y affichais ! Pour le réserver dorénavant aux seules publications personnelles, je viens de créer une page auteur qui, elle, relaiera mon actualité littéraire.

Je vous invite à vous abonner à ce nouveau lieu de rendez-vous : Fabienne Vincent-Galtié – Auteur.

Upcycling

Image par congerdesign de Pixabay

Lors d’une promenade dans le centre-ville, je suis entrée dans une boutique éphémère. L’une des exposantes proposait des créations en upcycling. Des pièces de tissu (rideaux, nappes, draps, foulards…) achetés chez Emmaüs et transformés par ses soins en vêtements. Si cette pratique a désormais le vent en poupe, dans un esprit développement durable, elle n’a rien de nouveau. Nos aïeules avaient cette sagesse et les savoir-faire nécessaires : elles recyclaient ! Les pulls étaient détricotés, la laine lavée et retricotés, les boutons décousus avant de donner un effet, on assemblait, on raccommodait avec ingéniosité et créativité. Les vêtements des adultes étaient retaillés pour les enfants, ceux des ainés pour les plus jeunes, les vieux lainages servaient de bourre à coussin, les tissus fin de doublure… Le recyclage était infini. J’en parle justement dans la nouvelle Point à la ligne de mon recueil éponyme :

« C’est elle (NDLR : il s’agit de la mère d’Adrienne, l’héroïne) qui préparait les repas en prenant bien soin d’éplucher le plus finement possible les pommes de terre, reprisait les chaussettes, cousait des sacs dans les vieux draps pour emballer des aliments ou du linge, ou encore coupait des serviettes hygiéniques pour ses deux filles et elle dans les draps de bain élimés. »

Upcycling aujourd’hui, usage de bon sens autrefois.