Une initiative à saluer, ces plaques, puisqu’il faut parfois rappeler l’évidence : Ici commence la mer ou le fleuve ou la rivière ou le cours d’eau. Et, non, les bouches-à égouts ne sont pas des poubelles à mégots, à papier et autres joyeusetés pour la nature.
Archives mensuelles : mai 2019
Les marques-pages, il y en a des tas de modèles, en carton, en tricot, en dentelle, en métal… C’est un support de création qui inspire depuis longtemps et sans faiblir semble-t-il. Chaque lecteur a le sien, les siens, des préférences à ce sujet du moins. Les marques-pages s’offrent et s’égarent. Certains sont recueillis par des bibliothèques collectionneuses, d’autres font le bonheur, ou pas, du lecteur suivant. D’aucuns passent de livre en livre sans jamais changer de main.
Moi, j’utilise pour marque-page un morceau de carton ou de papier du moment, un billet de train (ça, c’était avant !), un ticket de ciné ou de théâtre, une carte postale, une note de resto, une étiquette de vêtement… et je l’y laisse, la dernière page du livre tournée. Ainsi quand je reprends le livre, j’ai le plaisir de redécouvrir une trace de ma lecture passée.
Alléger ou libérer son style, rendre plus percutants ses textes, trouver sa voix… l’obsession des apprentis écrivains. « Lisez L’homme de gingembre de J.P. Donleavy, m’a conseillé très récemment Jérôme, un éditeur. Il a été révélateur pour moi. »
Quelle surprise ! Une claque plutôt. J’ignore tout de cet écrivain (1926-17) et si ses livres postérieurs sont écrits dans le même style, mais quel style ! J’imagine qu’il a été étudié et re-étudié par des générations d’étudiants en littérature. Un mélange d’art brut et d’impressionnisme si je pouvais oser un parallèle avec la peinture.
Extrait : Assise-là, face à moi, allumant des cigarettes. D’habitude, n’aime pas qu’on fume. M’aperçois qu’en ce moment tout me paraît bien. Au bout du tunnel, soudain, la lumière. Très chrétien. Lumière qui indique la voie. A cette pensée, il m’est arrivé d’entrer dans l’église de Clarendon Street, pour prier et parfois voir s’il y faisait plus chaud, et, après un moment d’immobilité, pour me détendre un peu. Je subis d’horribles tensions ; dans cette nostalgie catholique et irlandaise, j’étais pris d’une légère mélancolie et d’apitoiement, à considérer l’après et l’avant. J’y puisais souvent la conviction que j’allais vraiment gagner un peu de fric. Sais pas pourquoi le fric débarrasse de la mélancolie. mais c’est un fait. Ah ! Christine. Comment es-tu là-dessous ?
D’une phrase à l’autre le narrateur change, la pensée oscille, la lecture est compliquée, et le lecteur comme maintenu en apesanteur dans ce bric-à-brac littéraire. Et c’est parfait ainsi car en traitant un sujet aussi plombant, aussi glauque que la vie de débauche du héros et de son ami, l’auteur entraîne son lecteur sur un chemin tourmenté et obscène qui serait certainement plus insoutenable sans ces accents poétiques.
« Bienvenue à bord ! », c’est sur ces mots* que se termine la première version de mon prochain roman, Le voisin. Car, enfin, je viens de boucler ce premier jet. Je pourrais m’en réjouir, me dire que le boulot est bien avancé, mais il est trop tôt.
Durant ces mois d’écriture, j’ai fait connaissance avec les personnages de ce roman. Je sais maintenant ce qu’ils ont dans la tête car, croyez-moi ou non, je l’ignorais jusque-là. J’en avais bien une vague idée mais ils m’ont surpris. Surtout Greg, je dois dire, le fameux voisin.
Alors il me reste à réécrire cette version deux, dix ou vingt-cinq fois, qui sait ?, en cherchant la meilleure formule, pour que les personnages trouvent exactement leur place et que toutes les pièces de l’intrigue s’emboîtent parfaitement. Comme lors de la construction d’une maison, c’est les finitions qui prennent le plus de temps.
Seule certitude, le gros oeuvre étant terminé, c’est que l’ouvrage existe déjà. Et dans quelque temps, vous serez les bienvenus à bord, patience !
* Qui seront peut-être réécrits…
La semaine dernière encore, j’étais en Bretagne et vraiment j’aime cette région. Pourtant, elle a longtemps été pour moi une contrée lointaine, deux noms dans mon arbre généalogique maternel et quelques meubles foncés. Certaines familles ont leur oncle d’Amérique, moi j’ai cet arrière-grand-père vannetais. La seule branche « exotique » de mon double arbre lotois.
La frêle branche n’a pas survécu, plus aucun Guillanton ni Guillevic, dans ma famille, étouffée par le poids de la sécularité lotoise. Il ne reste plus que les meubles, foncés et chargés, ô combien, de motifs sculptés. Absolument typiques dit-on. De Vannes, ils ont émigré à Paris, puis à Prayssac (mon fief lotois maternel)) en suivant mon arrière-grand-père. Ma mère les a pris à Cahors, avec elle, ne pouvant se résoudre à abandonner cette part de son héritage. Et après elle, où iront-ils ?
La Bretagne, c’est, maintenant pour moi, surtout un goût de vacances et de randonnées côtières. Mais à chacune de mes visites, je ne peux éviter de penser à cet arrière grand-père, Louis Guillanton, que je n’ai pourtant jamais connu, et à ses meubles, certainement les derniers vestiges de cette mémoire familiale.